Allégorie de la Taverne et illusion scientifique
Allégorie de la Taverne et illusion scientifique
Il était une fois une grande taverne, un lieu scintillant de
lumières artificielles, résonnant de discours exaltés et de rires assurés. Dans
cette taverne, on servait des breuvages envoûtants, aux noms aussi prestigieux
que trompeurs : le scientisme, le techno scientisme, la rationalité absolue.
Ceux qui entraient dans cet endroit trouvaient une atmosphère rassurante : on
leur disait que tout était mesurable, que tout était explicable, et que la
vérité était là, à portée de main, dans les formules et les algorithmes.
Les clients, confortablement installés, étaient entourés
d’écrans projetant sans relâche des images d’un futur radieux : des villes
flottantes, des humains augmentés, une intelligence artificielle omnisciente
qui réglerait tous les problèmes. Chaque jour, on leur servait un nouveau
cocktail de progrès, toujours plus fort, toujours plus rapide.
Mais ce que personne ne voyait, c'était que cette taverne
était une cage dorée. Les murs étaient épais, sans fenêtre, et les portes
paraissaient scellées. Ceux qui se hasardaient à douter de la vérité servie ici
étaient immédiatement tournés en ridicule : « Réactionnaire ! Complotiste !
Néo-luddite ! » hurlaient les habitués, ivres de certitudes.
Un jour, un homme émergea d’une torpeur étrange. Il se
demanda si tout cela était bien réel, si la science et la technologie étaient
bien les clefs du salut qu’on lui promettait. Il tenta de trouver une issue et
finit par découvrir une porte dissimulée, couverte de poussière. Avec effort,
il l’ouvrit et sortit dans le monde extérieur.
Là, il découvrit la nature, le vent, la complexité du réel,
loin des simplifications outrancières de la taverne. Il comprit alors que la
science, au lieu d’être un chemin d’éveil, était devenue une ivresse, une
religion nouvelle où l’Homme s’était enfermé. Il se demanda : sommes-nous
réellement plus intelligents avec cette pléthore de savoirs technoscientifiques
? L’intelligence se résume-t-elle à l’accumulation de savoirs scientifiques ?
Savoir pour quoi faire ? Pour mieux comprendre en termes d’entendement, en
bonne intelligence, ou pour mieux tout manipuler ?
Il retourna dans la taverne, tentant d’avertir les autres.
Mais on le moqua, on le traita de fou, de nostalgique d’un monde dépassé. « Le
progrès est inéluctable, bois et oublie ces divagations ! » lui disait-on en
riant.
Ainsi, la taverne continua de servir ses breuvages, et les
ombres sur les murs continuaient de danser, toujours plus vite, toujours plus
folles, tandis que l’humanité s’enterrant sous sa propre sciure, creusait un
puits sans fond.
Mais un jour, peut-être, d’autres se lèveraient. D’autres
trouveraient la porte. Et alors, le vent de la réalité soufflerait à nouveau
sur l’Humanité.
Écométa
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